Bail commercial : la charge des travaux de ravalement incombe-t-elle au bailleur ou au preneur ?

 

En bref

Dans le dossier que nous avons eu à traiter, le locataire refusait de supporter le coût d’un ravalement.

Notre client, le bailleur, souhaitait savoir s’il était en droit de lui demander le remboursement de ces travaux.

La loi indique la répartition des charges relatives aux différentes réparations.

L’article 606 du Code civil met à la charge du bailleur les « grosses réparations ».

Selon la jurisprudence, ce sont des réparations qui « intéressent l’immeuble dans sa structure et sa solidité générale« .

Appliquée au ravalement, cette solution signifie que les coûts engendrés par un ravalement qui serait simplement un ravalement « d’entretien » peuvent être imputés au preneur.

Encore faut-il que le contrat prévoit que les dépenses relatives au ravalement d’entretien sont à la charge du preneur.

En l’espèce, c’était le cas donc le bailleur était en droit de réclamer le remboursement desdites sommes.

 

La répartition des charges : entre dispositions légales et stipulations contractuelles

Les travaux à la charge du bailleur sont les « grosses réparations » mentionnées par l’article 606 du Code civil.

Le locataire, quant à lui, doit prendre en charge le coût des réparations d’entretien prévues par l’article 605 du même Code.

La jurisprudence ne considère plus aujourd’hui la liste de l’article 606 comme exhaustive mais estime que les réparations qu’il vise sont celles qui « intéressent l’immeuble dans sa structure et sa solidité générale ».

À l’inverse, les réparations d’entretien sont celles qui sont « utiles au maintien permanent en bon état de l’immeuble ».

3e Civ., 13 juillet 2005, Bull. 2005, III, n° 155, pourvoi n° 04-13.764

 

Si le contrat ne prévoit pas de stipulations particulières relatives à la répartition des charges, c’est cette répartition légale qu’il faut retenir.

Dans le cas contraire, il faudra examiner les termes du contrat pour déterminer la répartition des charges.

À cet égard, il convient de relever que la loi Pinel est venue très fortement limiter la possibilité d’organiser contractuellement la répartition des charges.

 

La répartition des charges contractuelle entravée par la loi Pinel

Désormais, la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 interdit notamment de mettre à la charge du preneur les grosses réparations de l’article 606 du Code civil.

En effet, l’article R. 145-35 du Code de commerce dresse une liste des dépenses ne pouvant être imputées au locataire

Toutefois, tous les contrats ne sont pas concernés : c’est uniquement le cas des baux conclus ou renouvelés à compter du 5 novembre 2014.

Concrètement cela signifie que, pour les contrats conclus ou renouvelés avant cette date, la répartition prévue contractuellement demeure valable.

 

 

Les travaux de ravalement : un exemple concret de répartition des charges

Dans le cadre d’un dossier qui nous a été confié, le bailleur nous a demandé s’il pouvait exiger du locataire le remboursement des dépenses relatives à aux travaux de ravalement.

 

La nature du ravalement

Pour répondre à cette question, il faut d’abord connaitre la nature du ravalement : s’agit-il d’une « grosse réparation » ?

Plus précisément, il convient de se demander si le ravalement concerne la structure et la solidité générale de l’immeuble.

Si c’est le cas, il est incontestable que les dépenses restent à la charge du bailleur.

En revanche, qu’en est-il s’il s’agit d’un simple ravalement d’entretien ?

En toute logique, les dépenses relatives à un tel ravalement devraient incomber au locataire.

Toutefois la jurisprudence considère que « les dépenses de ravalement, qui ne constituent pas des charges locatives, incombent, sauf stipulation expresse contraire, au bailleur ». 

3e civ. 19 décembre 2012, Bulletin 2012, III, n° 188, pourvoi n° 11-25.414

 

Cela signifie donc que les dépenses relative au ravalement sont par défaut à la charge du bailleur, que le ravalement soit assimilé à de grosse réparation ou non.

Toutefois, cela veut également dire que ces dépenses peuvent incomber au locataire si le contrat le prévoit.

Attention, cet arrêt date de 2012 et il faut désormais prendre en compte les dispositions de la loi Pinel.

Le ravalement, comme tout autre réparation, ne pourra donc être mis à la charge du locataire s’il est assimilé aux grosses réparations de l’article 606.

 

En somme, il y a deux possibilités :

  • Le ravalement est une « grosse réparation » :
    Dans ce cas les dépenses sont supportées par le bailleur (sauf clause contraire pour les contrats conclus avant le 5 novembre 2014).
  • Le ravalement est une « réparation d’entretien » :
    Les dépenses sont tout de même supportées par défaut par le bailleur mais le contrat peut prévoir qu’elles seront supportées par le locataire.

 

Le ravalement prescrit par l’autorité administrative

Une fois la question de la nature du ravalement réglée, il faut encore vérifier si le ravalement a été prescrit par l’autorité administrative.

C’est une question importante car la jurisprudence considère que les travaux prescrits par l’autorité administrative sont dus par le bailleur, sauf clause contraire.

Concrètement, le bailleur doit insérer dans le contrat une clause qui prévoit que les dépenses engendrées par un ravalement (d’entretien) incomberont au preneur, même si celui-ci est prescrit par l’autorité administrative.

 

En l’occurrence, dans notre affaire, il s’agissait d’un ravalement d’entretien qui n’était pas prescrit par l’autorité administrative.

De plus, le contrat contenait une clause prévoyant que les dépenses afférentes seraient supportées par le locataire.

 

 

Comme vous l’aurez remarqué à travers cet article, la répartition des charges en matière de bail commercial peut être un véritable casse-tête.

C’est pourquoi vous ne devez pas hésitez à solliciter l’aide d’un professionnel pour vous accompagner dans vos démarches et répondre à vos questions.

Nous vous invitons à contacter l’équipe Partners in Law.

 

 

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